ARTICLE EN SOLDE
C’est la cavalcade dans les grands magasins
et moi qui suis chez le petit épicier
du bas de la rue
assis sur une étagère
entre les boîtes de lessive
et les sodas
je reste là
les jambes pendantes
à regarder toutes ces femmes
en talons hauts
en talons bas
descendre la rue
comme des gouttes de pluie
sur des toits de plexiglas
et mon petit épicier
a changé mon étiquette
et je suis même aujourd’hui
la promo de la semaine
un article en solde
la super promo
aux couleurs un peu passées
à force que la lumière me coule dessus
aux couleurs un peu ternies
à force que la poussière
me câline aussi.
Et j’entends la clochette
celle qui résonne comme l’arrivée de Dieu
quand un client entre dans l’épicerie
et je fais un sourire à la fille
qui commence à me tirer
les poils des mollets
et à me tâtonner
les poignets d’amour.
Et elle me chatouille tellement
que mon rire vient se glisser
sous son chemisier
et caresser les baleines
de son soutien-gorge
et un rire s’échappe de sa bouche
comme un moineau émoustillé.
Et elle me regarde
et me regarde encore
m’imaginant chez elle
dans sa cuisine
dans son salon
dans son lit
… et le matin
on se réveille
nus tous les deux
et le soleil semble tapoter
sur la vitre
pour vouloir entrer
par la fenêtre
et emmitoufler nos cœurs.
LES POILS DE NEZ DU DIABLE
Je me fais penser à une souris
dans un bol de lait
à nager la brasse
sur ton corps blanc
et à caresser la douceur des nuages
et tous ces grains de beauté
qui dansent comme des lutins
autour d’un feu de bois
nous invitent sans cesse
à de nouvelles farandoles.
C’est drôle, je n’aurais pas cru
que toi et moi…
et pourtant, c’est si simple
tout de suite si simple
que le Diable s’en arrache les
poils du nez
tandis que la Vierge Marie
nous prépare un gâteau au yaourt.
Toi qui parlais tant, au début
je te découvre
silencieuse, juste ta bouche
tes lèvres comme des îlots
de chair
sur lesquels je m’allonge
tu me parles de tes papillons
dans ton ventre
une flopée de papillons blancs
comme des mouchoirs de dentelle
agités par des centaines de mains
aux ongles vernis de rouge.
Tu sais comme je me plais dans ton petit studio
là où je passe la porte
dans ce couloir douillet
où je me faufile
pour vivre les yeux ouverts
pour vivre les yeux fermés…
lançant mon souffle
pour arracher du sol
ton cœur-confetti.
Et quand l’éclair déchire
le paravent de nos yeux
et que la lumière plonge
comme une torche dans l’océan
nous nous léchons les lèvres
pour ne pas perdre
le plus petit grain
de sel.